Intégralité de la contribution intitulée "Quelle égalité devant l'impôt ?"
Voici l'ensemble des réponses fournies par un contributeur du site officiel aux questions du thème Fiscalité et dépenses publiques le 27 janvier 2019 à Saint-Germain-en-Laye .

Que faudrait-il faire pour rendre la fiscalité plus juste et plus efficace ?
On met souvent en avant le principe intangible de l'égalité devant l'impôt. Comment faut-il le comprendre ? Un taux d'imposition unique, le même pour tout le monde, serait a priori le plus "juste". S'il était en outre impossible d'échapper à cette "flat tax", le système serait parfaitement "efficace".


Il n'y a en fait pas d'égalité devant l'impôt car, au-delà de fournir à l'Etat les moyens de fonctionner, l'impôt a aussi pour but la justice sociale, par la redistribution des richesses. La République est en effet non seulement indivisible, laïque et démocratique, mais aussi "sociale". C'est sous cet angle que la fiscalité doit être juste. L'égalité devant l'impôt est en réalité l'égalité devant la loi qui organise la solidarité.


La justice et l'efficacité de la fiscalité supposent d'abord qu'elle soit beaucoup plus simple et lisible.
Par exemple :

1/ Il ne faut pas que les virtuoses de l'évasion ou de l'optimisation fiscale mettent sa complexité à profit. Il faut supprimer les "niches fiscales", qui favorisent les mieux informés, les plus habiles et les plus nantis et entretiennent ipso facto le sentiment d'injustice. La profession de "fiscaliste" ne devrait pas exister.

2/ L'Etat ne devrait même pas inciter les citoyens à orienter leur épargne ou leur générosité vers tel ou tel objectif en leur offrant des réductions d'impôt : leur intérêt ou leur altruisme devrait suffire. Cela n'empêcherait pas l'Etat d'y consacrer directement le montant de l'impôt auquel il est prêt à renoncer.

3/ Il faut faire disparaitre les bizarreries comme l'abattement "spécial" censé compenser des frais professionnels (tout en subsistant en partie pour les retraités...). La compensation des frais professionnels relève de la négociation avec l'employeur, pas du fisc. L'abattement de 10% profite surtout aux hauts revenus, en leur permettant éventuellement de descendre d'une tranche.

4/ Toujours par mesure de simplification et de justice, il faut faire entrer toutes les sources de revenu dans le calcul de l'impôt, sans distinction de nature, allocations en tous genres comprises.

5/ La fiscalité est un outil essentiel de la redistribution entre riches et pauvres. Mais elle ne va pas assez loin puisqu'on consent aussi des tarifs réduits en fonction du niveau d'imposition pour certains services publics (cantines, crèches, transports, musées, etc...). On masque ainsi une partie de ce qui est réellement mis à la charge de l'impôt, tout en augmentant le nombre des "assistés", dont la condition est vécue comme humiliante d'un côté, dénoncée comme abusive de l'autre.

6/ (On pourrait craindre d'ailleurs que cet expédient soit étendu au prix à payer pour tout service ou produit, ne serait-ce que par le biais de la TVA. Les moyens techniques ne manqueraient pas pour ça...).

7/ Plutôt que de recourir à ces rafistolages, la société doit d'abord permettre à tout citoyen de disposer d'un minimum vital. Une forme de revenu de base universel, combiné à un barème d'imposition très progressif, depuis des tranches négatives pour les plus bas revenus jusqu'à des tranches très élevées pour les très hauts revenus, ainsi qu'à une forte taxation des grandes fortunes et des grosses successions (afin de donner corps à un autre grand principe, celui de l'égalité des chances) peut y contribuer.

8/ L'égalité devant l'impôt signifierait alors que tout citoyen est réellement imposable et concourt, à la mesure de ses moyens, au fonctionnement de l'Etat.

9/ Une fois les façons d'échapper à l'impôt devenues plus rares, la traque des fraudeurs deviendrait plus facile et plus efficace.


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