Afin de financer les dépenses sociales, faut-il selon vous...
Reculer l'âge de la retraite
Y a-t-il d'autres points sur les impôts et les dépenses sur lesquels vous souhaiteriez vous exprimer ?
L’excellente synthèse des dépenses du budget de l’état publiée en préambule de ce débat montre la dure réalité de la situation : le budget de l’état est plutôt bien géré, ce serait tellement plus facile s’il ne l’était pas car il y aurait des gisements importants d’économie ! Le régalien est très comparable à celui de nos voisins sinon inférieur, l’enseignement reste une priorité, les dépenses de protection sociale représentent 57.5% des dépenses totales mais ce ne sont pas celles qui sont visées par le débat ; seules la charge de la dette -3.7% dans la période de très bas taux d’intérêt actuelle- et les dépenses dites affaires économique -3.5% - pourraient être critiquées : mais pour baisser la charge d’intérêt, il faut rembourser la dette et les dépense « affaires économiques » sont supposées contribuer à améliorer l’emploi bien que je doute un peu de leur efficacité.
Le but est bien sûr de baisser les dépenses et non d’augmenter des impôts que tous s’accordent à trouver trop élevés. La tâche est donc difficile et passe par le travail de revue permanente de chaque ligne du budget ; le simple citoyen ne peut avoir que des sentiments : s’assurer que les dépenses de redistribution sont efficaces et contribuent à améliorer la condition de leurs bénéficiaires, contrôler les dépenses des collectivités territoriales –le nombre de ronds-points et leur richesse florale ou artistique fait parfois penser que l’on pourrait aisément faire moins cher même si les fleurs font toujours plaisir –, veiller à la revue permanente de l’efficacité de chaque dépense publique. J’ai le sentiment que c’est plutôt bien fait au niveau de l’état et de ses services décentralisés mais que ça l’est un peu moins bien au niveau des collectivités territoriales –région, communes- qui sont sans doute moins contrôlées.
L’essentiel des gisements d’économie me parait figurer dans les rapports annuels de la cour des comptes qui liste les erreurs de l’administration en matière de contrôle des participations publiques - Crédit Lyonnais de triste mémoire- et de choix d’investissement. Si on arrêtait de se tromper on économiserait quelqu’argent !
Dans le débat sur l’ISF, je n’ai jamais compris la distinction faite entre fortune immobilière et fortune financière au prétexte que le secteur immobilier ne serait pas productif pour l’économie ; c’est totalement inexact : le secteur immobilier fournit des services de logement, de mise à disposition de bureau ou de surfaces commerciales qui sont aussi nécessaires à l’économie que d’autres investissements ; il n’a donc pas de raison d’être l’objet d’un traitement fiscal pénalisant surtout au vu des besoins immobiliers du pays. Par contre, comme l’ont bien montré les travaux de l’économiste T. Piketty, l’accumulation du capital en des mains de moins en moins nombreuses mérite d’être corrigée par l’impôt : si le taux de croissance de l’économie est compris entre 1 et 2% en longue période, ce qui est déjà significatif, alors que le taux de rendement brut du capital est de l’ordre de 5% comme il l’a historiquement été, on comprend sans peine que le capital s’accumule chez ceux qui le détiennent et que l’ISF est un moyen important pour limiter cette accumulation du capital. Je suis donc en faveur de son rétablissement.
L’idée que l’état et ses démembrements n’ait pas vocation à être entrepreneur, qui conduit à des privatisations quasi systématiques, me parait fausse : il y a des domaines économiques ou l’état peut et doit jouer un rôle –infrastructures comme les aéroports ou les autoroutes, les différents réseaux dont l’économie globale est améliorée par une situation de monopole, et même certaines entreprises stratégiques-. Ces participations n’ont pas vocation à être déficitaire et leur accumulation au fil du temps pourrait apporter des sources de recettes significatives : l’état se trouverait bien de toujours bénéficier des recettes des sociétés d’autoroutes–indécentes aujourd’hui au point qu’une nationalisation pourrait constituer une bonne opération-, ou même de Renault ou de Total.
Enfin, on n’a, je crois, pas assez réfléchi aux conséquences des nouvelles formes d’activités économiques rendues possibles par le développement des traitements de données et les progrès de l’informatique : « uberisation », développement de l’auto entreprenariat, échanges hors marché, politiques de prix diversifiés en fonction de la demande. Sans vouloir être exhaustifs, ces développements créent de nouvelles formes d’activités qui échappent parfois aux cotisations sociales ou même à l’impôt. Ce sont à terme pas si éloigné des risques pour les recettes publiques et sociales qui voient leur assiette se rétrécir. Les politiques tarifaires visant à maximiser les recettes en adaptant les prix à la demande remettent en cause les bases de l’économie de marché ou l’ajustement entre offre et demande s’effectue par le prix : si plusieurs prix existent pour un même bien ou service, le prix ne peut plus jouer son rôle d’orientation du volume de l’offre sans parler des inégalités qui sont ainsi introduites entre les consommateurs. Toutes ces conséquences de l’émergence de nouvelles formes d’activités économiques rendues possibles par les progrès de l’informatique méritent plus d’études pour permettre leur compréhension et l’anticipation des politiques fiscales les concernant : on n’est pas encore parvenu à imposer une taxation efficace aux GAFA et, franchement, une taxe sur le chiffre d’affaires ne me parait adapté au sujet ! C’est ce que l’on pratiquait avant la TVA !
Dans le débat des gilets jaunes il a également été beaucoup question de pouvoir d’achat, thème que le Débat National n’aborde pas en tant que tel et que je traiterais donc ici. Les mesures adoptées en Décembre représentent de l’ordre de 1% du revenu des catégories de Français concernées, au mieux 2% pour celles qui en bénéficient le plus ; quand je regarde les comparaisons de prix réalisées par mon hyper marché préféré entre grandes surfaces de la zone, je constate qu’elles peuvent atteindre 8% ! Il y a donc sur les niveaux de prix un gisement de gain de pouvoir d’achat sans doute plus facilement exploitable que celui résultant d’une hausse des revenus ! De même les niveaux de prix entre différentes villes me semblent significativement différents sans que je puisse m’en expliquer les raisons. Sans parler des différences de prix entre les villes de province et Paris qui sont notoires. J’ai lu peu d’études sur ces questions de niveau de prix et je pense qu’il peut y avoir la des gisements significatifs d’augmentation du pouvoir d’achat. L’informatique a là aussi beaucoup à apporter puisqu’elle peut constituer un moyen de permettre l’information sur les prix : pourquoi ne pas susciter des associations renseignant en temps réel les prix des produits dans les divers magasins d’une région sur des sites internet ? C’est bien ce qui se pratique pour l’essence sur les autoroutes, avec d’ailleurs un résultat très mitigé puisque les prix s’alignent plutôt à la hausse !
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