Intégralité de la contribution intitulée "Aider les artisans - Promouvoir l'Artisanat"
Voici l'ensemble des réponses fournies par un contributeur du site officiel aux questions du thème Organisation de l'état et des services publics le 27 janvier 2019 à Saint-Étienne .

Que pensez-vous de l'organisation de l'Etat et des administrations en France ? De quelle manière cette organisation devrait-elle évoluer ?
Une situation d’abandon du réseau des Chambres de Métiers et de l’Artisanat

L’Etat qui exerce sa tutelle sur le réseau des Chambres de Métiers et de l’Artisanat a abandonné pourtant toute ambition pour ce réseau, laissé à l’abandon, malgré la richesse des collaborateurs qui y sont en activité.

Au lieu de réformer avec courage, l’Etat fait des demi-réformes sans résultat, exerce un contrôle par la ressource financière (suppression de missions rémunérées – stage préparatoire à l’installation, enregistrement des contrats d’apprentissage, enregistrement des entreprises, etc, supprimés dans les années à venir - sans courage pour définir un vrai projet, ou donner une raison d’être aux chambres de métiers et de l’artisanat au service de l’entreprenariat sur les territoires, même les plus reculés, et des très petites entreprises.


 Un management catastrophique des CMA

De nombreuses défaillances sont observées par l’Etat qui n’agit pas : rapport de Chambre Régional des Comptes, rapports successifs de parlementaires ou de corps d’inspection interne de l’Etat qui montre les déviances du réseau des Chambres de Métiers et de l’Artisanat sans qu’aucune mesure correctrice ou poursuite ne soit engagée. Une recherche sur internet montre les exemples d’abus sociaux observés dans les CMA au niveau national, ou les recrutements de complaisance, en détournement de tout droit public.

Les ressources financières collectées auprès des artisans ou issues de subventions publiques sont gaspillées en l’absence de pilotage, de prévisions, d’outils analytiques, de contrôle des dépenses, etc.

 Un statut du personnel protecteur et déresponsabilisant

Le statut des personnels est tellement protecteur, que ce statut constitue une garantie d’emploi à vie, en l’absence de toute responsabilité ou résultats exigés en contrepartie. Chambre en faillite, gestion défectueuse, management chaotique, absence de services de qualité aux artisans, etc. tout cela n’impacte en rien les rémunérations et les carrières mécaniquement ascendantes de cette « caste ». Les indemnités de licenciement hors du droit commun sont dissuasives pour l’employeur et dans tous les cas. Le poste de Secrétaire Général serait réservé par une forme d’examen, s’apparentant davantage à une cooptation.

Les rémunérations, en particulier des postes de Secrétaire Général, sont sans commune mesure avec les rémunérations d’artisans, pour une responsabilité nulle et charge de travail bien moindre. Au regard de la grille de rémunération qui est publique, un Secrétaire Général peut être rémunéré plus de 10Keuros par mois sans compter certainement les avantages indirectes (véhicules, carte bleue « déjeuner », etc).

Ces rémunérations indécentes au regard des compétences et de l’état de faillite où ont été plongées les chambres de métiers et de l’artisanat renvoient à la problématique des rémunérations d’organismes publics indépendants (Commission nationale des débats publics, médiateur de la République) et des hauts fonctionnaires (la directrice de l’INA, etc.

Les défaillances de management sont nombreuses. Le management est hérité d’un autre âge : hyper-vertical, hiérarchique à l’ancienne, fondé sur des compétences administratives ou comptables, etc, sans capacité d’animation, de gestion de projet, de logique de développement.

 Des élus déconnectés de la vie économique, vivant de leur activité consulaire

A l’origine la désignation d’artisans-élus dans la gouvernance des CMA, devait assurer que les décisions prises soient en rapport avec les besoins économiques des entreprises. Aujourd’hui, le statut d’élus de CMA est un tremplin pour des mandats et des compléments de rémunérations. Certains Présidents de CMA, dont l’activité artisanale est un alibi, vivent parfois des indemnités d’élus et des mandats complémentaires : autres mandats nationaux dans des institutions paritaires, organismes de formation, désignation au CESER, etc. Ainsi, un élu de Chambre de Métiers, inscrit comme artisan mais exerçant une activité « dormante », peut facilement dépasser les 3000 euros par mois, par le biais de cumul de mandats, d’indemnités de présence, etc.

Il y a une déviance totale de la gouvernance d’origine. De plus, la gouvernance adoptée, après guerre, est aujourd’hui en complet décalage avec la réactivité, l’agilité nécessaire pour développer une action utile pour les entreprises.

Selon vous, l'Etat doit-il aujourd'hui transférer de nouvelles missions aux collectivités territoriales ?
Oui

Si oui, lesquelles ?
Réformer en profondeur le réseau consulaire

Au lieu de l’asphyxie financière par l’Etat (qui pallie son incurie en matière de management) qui conduit à une lente agonie dont les premières victimes sont les salariés, l’Etat doit engager une profonde transformation du réseau consulaire :

 Il est nécessaire de redéfinir le rôle économique et sur les territoires des réseaux consulaires. Ces réseaux, quelle que soit leur forme (association, établissement public, agence régionale, etc), doit devenir le bras armé de l’action économique sur les territoires. Peut-on l’imaginer comme le bras armé opérationnel de l’Agence des Territoires ? La proximité et l’expertise des conseillers au contact des artisans sont les grands atouts du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat.

 L’Etat doit engager la fusion des CCI et CMA et leur transformation en agence économique territoriale, avec un lien fort avec les Conseils Régionaux.

Aujourd’hui, il est évoqué la régionalisation ou la départementalisation par fusion des CCI-CMA. Ce débat stérile, avec de façon sous-jacente un affrontement des organisations professionnelles (CPME-MEDEF contre U2P) qui n'ont d'intérêt seulement que de défendre leur existence et non pas de promouvoir l'Artisanat, n’a aucun sens et ne respecte aucune logique d’intérêt général des entreprises artisanales. Une organisation régionale, avec la fusion CCI-CMA, calquée sur les Régions, mais en privilégiant une forte implantation territoriale, technique doit être organisée. Le politique doit rester uniquement un organe stratégique, sans intervention dans le fonctionnement au quotidien de cet organisme qui doit être géré par des directeurs compétents pour leur expérience, dans le domaine économique, de l'aménagement, de la formation-apprentissage principalement.

De nombreux rapports auxquels le Président MACRON a participé, évoquent cette fusion, mais contre toute logique, mais sous le joug des lobbys des organisations professionnelles, l’Etat fait preuve d’une grande lâcheté à engager cette réforme… au détriment des milieux économiques et de l’efficacité de l’action publique.

 Artisan, commerçant, start up, etc… les problématiques de la TPE sont quasi-identiques. L’agence doit accompagner les très petites entités économiques sur les territoires. Les spécificités métiers des artisans doivent pouvoir être traitées dans une organisation plus large à l’attention de toutes les TPE.

Une « maison des artisans », à l’image des « Maisons de l’emploi », très étroitement construite avec les collectivités territoriales de proximité, peut tout à fait trouver sa place dans une entité dédiée sur les territoires à l’accompagnement des TPE.

Estimez-vous avoir accès aux services publics dont vous avez besoin ?
Non

Si non, quels types de services publics vous manquent dans votre territoire et qu'il est nécessaire de renforcer ?
Une maison des artisans, qui soit dédiée à l'accompagnement des petites entreprises qui animent nos territoires mais qui sont confrontés à de multiples difficultés au quotidien.

Quels nouveaux services ou quelles démarches souhaitez-vous voir développées sur Internet en priorité ?
Les réformes de la loi PACTE de simplification de la vie des entreprises vont dans le bon sens. En revanche, parallèlement, il faut recentrer les Chambres de Métiers et de l'Artisanat sur l'accompagnement économique des entreprises qui ne peut pas se faire de façon virtuelle et dématérialisée car il ne s'agit pas de tâches automatisées mais du sur-mesure, et en proximité.

Avez-vous déjà utilisé certaines de ces nouvelles formes de services publics ?
Oui

Si oui, en avez-vous été satisfait ?
Non

Quelles améliorations préconiseriez-vous [des nouvelles formes de services publics] ?
Il faut des lieux spécialisés pour les artisans, à l'échelle départementale sur le plan opérationnel, mais avec une pilotage régional en lien étroit avec l'action économique des Conseils Régionaux.

Quand vous pensez à l'évolution des services publics au cours des dernières années, quels sont ceux qui ont évolué de manière positive ?
Aucune logique positive, car le retrait de l'Etat s'est traduit par un retrait des territoires et la montée en puissance des Conseils Régionaux ne s'est pas appuyée sur des organisations présentes sur les territoires. Les quelques agences économiques régionales existantes ont une implantation territoriale souvent inférieure au réseau consulaire. Ce réseau doit être maillé avec les forces économiques, les outils, les moyens des Conseils Régionaux?

Connaissez-vous le "droit à l'erreur", c'est-à-dire le droit d'affirmer votre bonne foi lorsque vous faites un erreur dans vos déclarations ?
Oui

Si oui, avez-vous déjà utilisé ce droit à l'erreur ?
Non

Pouvez-vous identifier des règles que l'administration vous a déjà demandé d'appliquer et que vous avez jugées inutiles ou trop complexes ?
De nombreuses demandes pourraient au moins être dématérialisées. Il y a un retard sans commune mesure avec ce qu'à pu réaliser les finances publiques (impôts).

Faut-il donner plus d'autonomie aux fonctionnaires de terrain ?
Oui

Faut-il revoir le fonctionnement et la formation de l'administration ?
Oui

Si oui, comment ?
Il existe un très gros problème de management des administrations publiques qui prennent leur origine à la tête de l'Etat: politique pas claire, aucune logique de résultats sauf sur des indicateurs quantitatifs souvent dévoyés, etc. Il faut sortir de cette mécanique dé responsabilisante.

Dans les Chambres de métiers et de l'Artisanat, il y a nécessité de de désigner des managers d’entités économiques, avec une compétence de l’action économique puisqu’il s’agit d’accompagner les entreprises, devant rendre des comptes à l’Etat. Aujourd'hui, il y a une totale impunité.

Si vous avez été amené à créer une entreprise, pouvez-vous indiquer les éléments de satisfaction et/ou les difficultés rencontrés en précisant, pour chaque point, l'administration concernée :
La Chambre de métiers et de l'artisanat offre de bon service, mais bien en deça de ce qu'on peut en attendre. Elle ne joue pas son rôle sur les territoires, en lien avec les collectivités.

Y a-t-il d'autres points sur l'organisation de l'Etat et des services publics sur lesquels vous souhaiteriez vous exprimer ?
 Les ressources des CMA ne doivent pas être basées sur des taxes prélevées au détriment des entreprises (une réforme de la fiscalité doit intégrée ce point et supprimée la « taxe pour frais de chambre ») mais par une dotation de l’Etat où les moyens sont en adéquation avec les objectifs à atteindre, dans le cadre d’une négociation Etat/agence économique territoriale.


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