Que faudrait-il faire pour rendre la fiscalité plus juste et plus efficace ?
L’évasion fiscale est sur le devant de la scène internationale depuis plusieurs années. Mais chaque fois qu’une faille fiscale est bouchée, les multinationales en trouvent dix autres. Le cas d’Apple illustre parfaitement cette situation : après avoir été épinglée au sujet de ses filiales en Irlande, elle a réussi à leur trouver une domiciliation fiscale à Jersey pour continuer à éviter l’impôt. Pour neutraliser durablement les transferts artificiels de bénéfices vers les paradis fiscaux, il faut transformer en profondeur l’imposition des multinationales. La taxe globale est un pas important dans cette direction. Également appelée « taxation unitaire », elle appréhende chaque multinationale comme un tout, une « unité » de production de valeur. Ainsi, les bénéfices des multinationales ne font sens qu’à l’échelle globale et non plus à l’échelle de chaque territoire dans lequel ils sont artificiellement enregistrés. Une fois ce principe d’unité posé, il convient de réfléchir à la manière de réattribuer ce bénéfice imposable global en fonction de critères mesurant l’activité réelle dans chaque pays. Concrètement, la taxe globale consiste à calculer l’imposition des entreprises dans un pays à partir de trois indicateurs : Un indicateur qui mesure l’emploi nécessaire à cette activité, avec par exemple le nombre d’employé·e·s, les salaires versés, ou un mélange des deux. Un indicateur du capital physique détenu par l’entreprise sur place : machines, locaux, etc, agrégés par leur valeur monétaire. Cela exclut volontairement le capital immatériel, qu’il s’agisse de droits de propriété ou d’actifs financiers, qui sont facilement délocalisables dans des paradis fiscaux. Un indicateur de l’activité commerciale avec le montant des ventes, et non le chiffre d’affaires qui peut lui aussi être réduit artificiellement. On détermine alors la part des bénéfices imposables associée à chacun de ces indicateurs, ce que l’on qualifie de « formule de répartition » . Par exemple, il est possible d’associer à chacun des trois indicateurs une part égale, c’est à dire un tiers des bénéfices imposables globaux. Mais on peut aussi donner plus de poids à l’un ou l’autre. Une fois la formule choisie, on attribue au pays une part du bénéfice imposable associé à chaque indicateur proportionnellement à l’activité dans le pays. En additionnant les bénéfices imposables attribués selon les différents indicateurs, on obtient le bénéfice imposable total dans le pays. On applique alors le taux d’imposition en vigueur sur le territoire pour déterminer les impôts à prélever sur ces bénéfices. On peut illustrer cette méthode de taxation unitaire avec le cas d’Apple en France. En 2016, ses deux filiales locales représentaient : 1,8 % de l’ensemble des salarié·e·s d’Apple dans le monde, 0,3 % de son capital physique, et 2,2 % de ses ventes mondiales. Si l’on applique la formule de répartition avec un poids égal pour chacun des indicateurs, on trouve qu’Apple aurait dû payer 261 millions d’euros d’impôts supplémentaires en France en 2016. Au total, entre 2004 et 2016, ce sont 1,5 milliards d’euros supplémentaires que la multinationale aurait dû verser. Cela montre clairement que les impôts qu’elle règle à l’heure actuelle en France sous-estiment grandement son activité réelle sur le territoire.
Afin de financer les dépenses sociales, faut-il selon vous...
Augmenter les impôts
Y a-t-il d'autres points sur les impôts et les dépenses sur lesquels vous souhaiteriez vous exprimer ?
PROPOSITION DE LOI CONTRE L'EVASION FISCALE Préambule : Pour récupérer les 80 milliards d’euros d’évasion fiscale perdus chaque année, une loi d’urgence est nécessaire. Aux Etats Unis, la loi Sarbanes-Oxley de 2002, adoptée suite au scandale ENRON, prévoit qu’en cas de falsification des états financiers, le directeur général et le directeur financier soient passibles d'une amende d'un million de dollars ou une peine de dix ans de réclusion ou plus. Cette loi a permis de récupérer des dizaines de milliards d’amendes. Elle a également permis au fisc américain de faire ouvrir les comptes des banques suisses. Lutter contre l’évasion fiscale, c’est trouver des financements pour assumer les transitions nécessaires à notre avenir. Pour la seule transition énergétique, cela créerait un million d’emplois. La loi pour contrer l’évasion fiscale doit être une loi d’urgence 2019. Article 1 : Les entreprises dont le chiffre d’affaire dépasse 150 millions d’euros devront publier chaque année le chiffre d’affaires, le nombre d’employés, le bénéfice et le montant d’impôt payé, pour chaque pays où elles ou leurs succursales exercent leur activité. Ces données sont accessibles à tous les citoyens conformément à la déclaration des droits de l’homme. Article 2 : En cas de falsification, le directeur général et le directeur financier sont passibles d’une peine de prison. Article 3 : Dans le cadre d’une politique volontariste de transparence, en adéquation avec la Responsabilité Sociale de l’Entreprise, les entreprises, qui accepteront que ces informations soient rendues publiques avant la mise en application de la loi, se verront attribuer un label « entreprise fiscalement citoyenne »
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