Intégralité de la contribution intitulée "Travail collectif du groupe local Cimade 65 en lien avec des adhérents d'autres associations sur les questions d'accueil des étrangers"
Voici l'ensemble des réponses fournies par un contributeur du site officiel aux questions du thème Démocratie et citoyenneté le 16 mars 2019 à Tarbes .

Que pensez-vous de la situation de l'immigration en France aujourd'hui et de la politique migratoire ? Quelles sont, selon vous, les critères à mettre en place pour définir la politique migratoire ?
Il faut d'abord réformer la politique européenne de non-accès au territoire européen en violation des droits humains. Car elle vise avant tout à empêcher l'arrivée de personnes étrangères de certains pays (politique de visas restrictive, etc.) L'immigration est instrumentalisée depuis toujours par l'extrême-droite en entretenant systématiquement la suspicion vis-à-vis des immigrants et en les stigmatisant. Aujourd'hui, comme à la fin des années 1930, la rhétorique de l'extrême-droite est reprise de façon euphémisée par le gouvernement français, comme par beaucoup d'autres en Europe, parfois plus explicitement. Cette légitimation du soupçon entretient les mythes les plus fantaisistes sur la réalité de l'immigration en France : fantasmes d'invasion, croyance à des ""droits"" exorbitants du droit commun accordés aux immigrés. Ceci alors que la réalité est à l'inverse celle d'une moindre ouverture de la France que les pays voisins. Avec environ 250 000 titres de séjour par an, la France est loin d'être ""envahie"", et son malthusianisme manifeste en matière de droit d'asile alimente la multiplication des sans-papiers, qui sont, au pire, livrés en pâture à tous les trafics et à la criminalité organisée, et, au mieux, confiés à la sollicitude privée de nombreux -ses citoyen-ne-s , injustement stigmatisés par le déli persistant de solidarité, malgré le dernier avis positif du Conseil constitutionnel sur le cas Herrou. Le premier critère à mettre en place serait, ironiquement, celui de la transparence des intentions et de la politique gouvernementale : qu'elles assument clairement leur refus de l'égalité des droits pour les exilés ! Plus sérieusement, ce serait d'inverser ces intentions et cette politique qui ne font que nourrir l'extrême-droite. Donc assumer au contraire l'accueil et l'hospitalité sur la base de l'égalité des droits. Pour cela, informer largement nos concitoyens sur les causes et la réalité des migrations forcées. Et faire appel à leur sens de l'accueil et de la solidarité, plutôt qu'à leurs craintes et à leurs préjugés. Et donc donner aux associations telles que les nôtres les moyens d'agir dans ce sens. Et garantir à tous bienveillance et égalité de traitement. Pour cela, il faut réformer le droit d'asile en y incluant les causes nouvelles de migrations forcées (climat....) et mettre en place un système unifié d'asile européen.

En matière d'immigration, une fois nos obligations d'asile remplies, souhaitez-vous que nous puissions nous fixer des objectifs annuels définis par le Parlement ?
Encore faudrait-il commencer par remplir nos obligations d'asile en cessant de faire de la demande d'asile un parcours du combattant à volonté dissuasive. Cette politique ne dissuade pas grand monde, mais crée de la précarité, de l'humiliation, de la méfiance et du mensonge. Il faut assurer que la réponse à une demande d'asile ne relève pas de l'arbitraire ou de la loterie et pour cela permettre une instruction menée dans de bonnes conditions. Cesser les rétentions administratives inutiles en revenant sur leur prolongation de 45 à 90 jours sur laquelle le CGLPL vient de signaler les carences de la prise en charge sanitaire des retenus. Une fois ces conditions réunies, la mise en place de ""quotas"", comme il est implicitement proposé, est une fausse réponse à la question de ""l'acceptation sociale"" de l'immigration. La bonne réponse est plutôt une politIque d'égalité des droits qui permettrait une intégration progressive réussie des nouveaux arrivants, comme on l'a connu dans le passé , avec un titre unique de séjour avec droit au travail dès l'arrivée. Au lieu de la création, comme aujourd'hui, de ghettos alimentés par l'inégalité des droits et la clandestinité qu'elle génère.

Que proposez-vous afin de répondre à ce défi qui va durer ?
La réponse est déjà donnée : informer largement sur les causes et la réalité des migrations en s'appuyant sur les témoignages des intéressés et le travail des scientifiques. Garantir le respect intégral et non sélectif des droits humains universels. Faire appel aux sentiments positifs de nos concitoyens en s'appuyant sur leurs actes de solidarité spontanée et en les valorisant au lieu de les criminaliser, et non à leurs affects négatifs. Aider les associations investies dans l'accueil et non contre-carrer leur action. Car notre peuple n'est pas naturellement et globalement xénophobe : il ne le devient, partiellement, que sur les suggestions venues d'en haut qui cautionnent la rhétorique raciste de l'extrême-droite, et parce que sa propre situation est précaire et qu'il subit l'injustice sociale.

Quelles sont, selon vous, les modalités d'intégration les plus efficaces et les plus justes à mettre en place aujourd'hui dans la société ?
Est-ce à l’État de le dire ? En réalité, l'intégration s'est faite, et continue de se faire spontanément si l'on assure à tous-tes l'égalité des droits, notamment l'accès à un hébergement stable et digne dès leur arrivée dans le cadre du droit au logement pour tous, et si l'on évite les discours et comportements stigmatisants à l'encontre de l'une ou l'autre des communautés d'immigrants. Car celles-ci ont toujours et continuent d'exister temporairement dans un premier temps, et elles se dissolvent toutes seules au fil du temps si les conditions précédentes sont réunies.


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