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PROCEDURES PARTICIPATIVES : REMPLACER L’ENQUETE PUBLIQUE PAR DES AUDIENCES PUBLIQUES Michel Sablayrolles et Hubert Calmels *** Synthèse : L’enquête publique est trop vieille ? Passons à autre chose ! Que faut-il changer ? Voici quelques propositions : • Le personnage central, l’animateur, ex-commissaire enquêteur, doit disposer d’un profil plus dynamique, plus réactif et il doit être le vrai responsable et le chef d’orchestre de la procédure. • Ce sera un véritable manageur, sachant communiquer, pourvu d’un esprit rigoureux capable d’écoute et de fortes synthèses, indépendant, sensible à l’intérêt général et à la protection environnementale. Un examen vérifiera ces aptitudes. La professionnalisation, à temps partiel, pourra être envisagée. • Il utilisera de nombreux, nouveaux et imaginatifs vecteurs de communication. Il ira lui-même à la rencontre des citoyens, au marché, dans la rue, et sur tous lieux publics opportuns. • Les citoyens disposeront d’un droit de saisine réaliste pour organiser ces audiences publiques. • Le recours aux expertises indépendantes sera généralisé. • Aux règlements tatillons auxquels est soumis l’enquête publique sera substituée une obligation de résultat à l’égard de la participation des citoyens. Le succès viendra de leur participation, l’échec de leur absence. • Appeler cette nouvelle procédure : audience publique. Exposé : Malgré les espoirs suscités par la loi fondatrice de 1983, l’enquête publique demeure pour beaucoup un vestige du passé inutile, encombrant et couteux. Curieusement la plupart des acteurs de cette procédure en saluent toutefois les nettes et récentes améliorations lui conférant un rôle significatif à l’égard de la participation citoyenne et aussi de la plus-value apportée aux projets. Il est possible de signaler, entre autres exemples, l’avis documenté et argumenté des conclusions défavorables de l’enquête portant sur le grand projet sud-ouest des lignes à grande vitesse Bordeaux-Dax et Bordeaux-Toulouse qui a contredit les critiques de servilité de la commission d’enquête, montré une réelle participation citoyenne, et conduit à de longues et toujours incertaines réflexions quant à la décision de réalisation de ce projet. Quoiqu’il puisse être dit, l’idée selon laquelle l’enquête publique est d’un autre âge, vieillotte, inadaptée, se perpétue. Une ministre de l’environnement l’a qualifié de « vieille dame ». Aussi nous proposons de passer aux nouvelles audiences publiques. Des innovations substantielles conséquentes apportées à la vieille enquête publique donnerait à ces audiences publiques une réelle efficacité. 1 – Concernant les animateurs (les actuels commissaires-enquêteurs) : • Leur rôle est d’assurer l’information et la participation des citoyens ; au sein de l’équipe organisatrice regroupant autour d’eux les représentants de l’Etat, les responsables des projets, les élus, et éventuellement les associations et autres porteurs d’opinion, il doit être l’élément central qui décide lui-même, en collaboration avec l’équipe organisatrice, les objectifs et les modalités de l’audience publique ; il doit en être « le chef d’orchestre » ; • Le profil de ces animateurs doit d’abord s’appuyer sur des capacités de management, à l’égard de l’ensemble des intervenants à la procédure cités ci-dessus et des citoyens appelés à participer ; • Il doit avoir de bonnes aptitudes à la communication publique, pour tenir son rôle lors des réunions et paroles publiques ; • Ce profil doit aussi inclure le sens de l’intérêt général, de l’équité, d’une empathie à l’égard des échanges argumentaires, des qualités d’écoute, de rigueur et de synthèse, ainsi qu’une réelle sensibilité à l’environnement et aux évolutions sociétales ; • La capacité rédactionnelle vis-à-vis des rapports, compte-rendu et conclusions sera nécessaire ; • Une connaissance des modes et règles de fonctionnement des procédures ainsi qu’un minimum de savoir sur les objets, projets ou plans mis à audience est nécessaire ; • La diversité de la société citoyenne doit pouvoir se retrouver et se reconnaître au sein de leur vivier en termes d’âge, de sexe, d’origines sociales et professionnelles (il faut sortir du « tous retraités ») ; • La question du professionnalisme de ces acteurs doit être posée, vraisemblablement à temps partiel et concernant aussi les retraités. • Il conviendra de vérifier efficacement ses aptitudes en s’appuyant sur une procédure probante. 2 – Concernant les vecteurs de communication : • Les vecteurs habituels des débats et enquêtes publics offrent un panel intéressant que l’imagination des divers intervenants pourrait enrichir ; il parait opportun que l’audience publique ait, à minima, recours aux pratiques du débat public : cahier d’acteurs, questions-réponses, stands dans les lieux publics, réunions publiques thématiques, etc. 3 – Concernant la structuration temporelle des audiences : • Dans l’hypothèse où l’audience n’aurait pas été précédée d’une phase amont ayant acté l’opportunité, et en vue de préserver la cohérence des échanges, il convient de prévoir, au sein de la procédure, d’abord un premier temps pour aborder cette opportunité, ou les aspects généraux, puis un deuxième temps pour l’analyse de l’insertion de proximité et de ses impacts localisés ; • Chacune de ces deux phases sera à son tour ordonnée avec un premier temps dédié à l’Information avant d’ouvrir la participation. 4 – Concernant le recours aux expertises indépendantes, aux investigations portant sur des solutions alternatives : • Donner à ces audiences les délais et financements nécessaires, dans le respect de limites de bon sens à définir ; • Se poser, à l’égard des sachants appelés à contribuer, experts ou bureaux d’étude, la question de l’indépendance et de la compétence, toutes deux ici, simultanément requises. 5 – Concernant la réactivité des procédures : • Une obligation d’enquête dynamique, vers les porteurs d’opinion, associations, élus, entrepreneurs, commerçants, acteurs sociaux, simple public, etc. sera donnée aux futurs animateurs ; ceux-ci devront aller eux-même à la rencontre des porteurs d’opinion, ainsi que des citoyens, au marché, dans la rue, et sur tous lieux publics opportuns. • Préalablement à l’ouverture de l’audience publique, un contact sera pris auprès des associations et des porteurs d’opinion pour recueillir leurs avis et propositions sur l’objectif et l’organisation de la procédure. • Ces acteurs et intervenants, rencontrés par l’animateur, pourraient demander, et donc, si la démarche est fondée, obtenir, des remises en question du projet ou de ses caractéristiques. 6 – Concernant la règlementation des procédures : • Libérer celles-ci d’une trop forte emprise de la règlementation souvent tatillonne (le « corset » règlementaire) et prioriser l’obligation de résultat à l’obligation de moyens ; le succès de l’audience publique viendra de la participation effective et nombreuse des citoyens, l’échec de leur absence. • Un système d’appréciation de la satisfaction des citoyens à l’égard de l’audience et de ses animateurs pourrait être institué. 7 – Concernant le champ d’intervention : • Cesser de le restreindre, comme il est fait depuis plusieurs années et aujourd’hui encore, mais au contraire l’étendre à tous les projets impactant l’environnement. • Introduire une saisine citoyenne réaliste. ***
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