En dehors des élus politiques, faut-il donner un rôle plus important aux associations et aux organisations syndicales et professionnelles ?
Oui
Le non-cumul des mandats instauré en 2017 pour les parlementaires (députés et sénateurs) est :
Une mauvaise chose
Pourquoi ?
lien avec le territoire et les citoyens
Pensez-vous qu'il serait souhaitable de réduire le nombre d'élus (hors députés et sénateurs) ?
Non
Faut-il prendre en compte le vote blanc ?
Oui
Faut-il faciliter le déclenchement du référendum d'initiative partagée (le RIP est organisé à l'initiative de membres du Parlement soutenu par une partie du corps électoral) qui est applicable depuis 2015 ?
Oui
Pensez-vous qu'il faille instaurer des contreparties aux différentes allocations de solidarité ?
Oui
Si oui, lesquelles ?
du travail / formation
Y a-t-il d'autres points sur la démocratie et la citoyenneté sur lesquels vous souhaiteriez vous exprimer ?
Réforme de la constitution de la V -ème République française :
proposition d’instaurer une procédure démocratique de mise en responsabilité du président de la République française
devant les citoyens français
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Date : 14/01/19
Objet : réforme de la constitution française / droit européen / procédure démocratique de mise en cause de la responsabilité politique du Président de la République française.
Rédacteur : Jean-Pierre Audy
conseiller municipal de Meymac,
membre de l’Assemblée politique du Parti populaire européen
ancien député européen (2009 – 2014), ancien président de la délégation française au groupe du Parti populaire européen (PPE) au Parlement européen (2010 – 2014)
membre des conseils d’administration de l’Association des anciens membres du Parlement européen et de la Fondation pour la démocratie parlementaire.
s’exprimant à titre personnel.
Résumé :
Actuellement, selon la constitution de la V -ème République, le président de la République française n’est pas responsable de ses actes politiques.
Compte-tenu de la place importante prise progressivement par le chef de l’Etat dans le paysage politique national, européen et international, la question de la mise cause démocratique de sa responsabilité politique se pose d’autant que c’est une exigence des Traités européens pour qu’il puisse représenter la République française au Conseil européen.
Texte
Le président de la République française jouit d’une irresponsabilité absolue et permanente juridiquement sur les plans civil et pénal mais également politique (article 67 de la constitution : le président de la République « n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité ») avec, cependant, deux exceptions : poursuite devant la Cour pénale internationale pour crime contre l’humanité (article 53-2 de la constitution) et destitution prononcée par le Parlement constitué en Haute cour (majorité des 2/3 des inscrits) « en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat » (article 68 de la constitution) .
La présente réflexion ne concerne pas la poursuite pour crime contre l’humanité et s’agissant de la destitution « en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat », je fais des commentaires un peu plus loin dans le texte.
L’instauration d’une procédure démocratique de mise en responsabilité politique du président de la République française doit être débattue car une telle procédure fait partie des règles applicables dans toutes les grandes démocraties dans le monde et est une exigence du Traité sur l’Union européenne (TUE) pour pouvoir être membre du Conseil européen.
S’agissant du Conseil européen, l’article 10-2 du TUE prévoit, à la rubrique des principes démocratiques de l’Union, que « Les citoyens sont directement représentés, au niveau de l'Union, au Parlement européen. Les États membres sont représentés au Conseil européen par leur chef d'État ou de gouvernement et au Conseil par leurs gouvernements, eux-mêmes démocratiquement responsables, soit devant leurs parlements nationaux, soit devant leurs citoyens. »
Il n’est donc pas contestable que la personnalité qui représente la République française au Conseil européen ne peut pas être le chef de l’Etat du fait de son irresponsabilité politique.
Les modalités de désignation du chef de l’Etat au suffrage universel ne sont pas, à elles seules, un élément permettant d’affirmer que le président de la République française est responsable démocratiquement car la responsabilité s’apprécie sur des actes et non sur des promesses électorales. Par exemple pour le Portugal, le président de la République est élu au suffrage universel avec des pouvoirs comparable au président français et ne siège pas, pour autant, au Conseil européen où cet Etat est représenté par son Premier ministre.
S’agissant de la seconde exception au principe général d’irresponsabilité (destitution « en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat »), elle pourrait être mise en avant pour affirmer que le statut constitutionnel du président de la République lui permet de remplir les exigences démocratiques du TUE pour qu’il représente la France au Conseil européen car il est possible de le destituer ; donc il serait responsable démocratiquement devant le Congrès.
Néanmoins cette thèse est, pour le moins, très discutable.
En effet, cette procédure a pour unique objet, ainsi que l’exprime le Premier ministre de l’époque, Dominique de Villepin le lundi 19 février 2007 devant le Congrès à Versailles pour la présenter, de destituer le chef de l’Etat pour le rendre justiciable de faits commis par lui et qui seraient incompatibles avec l’exercice de son mandat. Je cite Dominique de Villepin ce lundi 19 février 2007 devant le Congrès : « Avec ce texte, nous reconnaissons au Parlement le pouvoir de destituer le chef de l’État en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. Des faits de cet ordre pourront conduire le Parlement, réuni en Haute Cour, non pas à juger le Président de la République, mais à le rendre à nouveau justiciable des juridictions de droit commun en mettant fin à son mandat. Tel est l’objet de l’article 68, composé de six alinéas. »
Ainsi donc, les actes politiques, dès lors qu’ils sont pris en respect des pouvoirs que la constitution donne au président de la République (par exemple ceux attachés à la fonction de chef des armées ou à l’action internationale), ne peuvent pas être « manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat » et, donc, ne devraient pas pouvoir être la base d’une destitution. Dans ces conditions, il paraît très difficile de considérer que le président de la République française est responsable devant le Parlement et respecte les exigences démocratiques du TUE pour représenter la France au Conseil européen.
En l’occurrence, cette représentation revient au Premier ministre.
Mais avant de porter un œil critique sur la violation du droit européen, de donner des éléments historiques et de faire des propositions, je propose quelques considérations générales sur la pratique présidentielle française en matière d’affaires étrangères.
1 - Considérations générales sur la pratique de la fonction présidentielle de la République française
La pratique de la fonction présidentielle montre que la base juridique constitutionnelle de son exercice mérite, à minima, d’être débattue, précisée et d’évoluer de telle sorte que le droit soit mis en conformité avec elle.
Au fil du temps, les présidents de la République française successifs se sont accaparé une place très importante dans la vie politique nationale, européenne et internationale alors qu’en réalité, il ne dispose que peu de pouvoirs propres : nomination du Premier ministre en prenant en considération la majorité parlementaire, dissolution de l’Assemblée nationale (c’est là son pouvoir le plus important), mise en œuvre des pouvoirs exceptionnels, chef des armées, négociation et ratification des traités internationaux.
Pour l’essentiel, tous les autres pouvoirs du chef de l’Etat sont contresignés par le Premier ministre ou le membre du gouvernement concerné (pouvoirs réglementaires, nomination des membres du gouvernement, promulgation des lois, textes réglementaires etc…). Ce ne sont pas des pouvoirs propres et sa marge de manœuvre est plus étroite qu’on ne l’imagine d’autant plus que, s’il refusait de co-signer des textes relevant de cette catégorie, il entrerait en conflit ouvert avec le gouvernement et la majorité parlementaire qui le soutient et, sauf à dissoudre l’Assemblée nationale, il pourrait être destitué pour manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat.
Sur le plan international, dont il est souvent affirmé que c’est le domaine « réservé » du président de la République française, la pratique des présidents d’exercer des pouvoirs en matière de politique extérieure et de défense sont des usages récurrents qui s’accentuent lorsque le président dispose de sa majorité parlementaire : en réalité, ces pratiques politiques n’ont pas de base juridique constitutionnelle précise et les textes sont souvent ambigus.
Par exemple, s’agissant des traités internationaux, le président de la République dispose du pouvoir de négocier et ratifier les traités mais ce n’est pas lui, en général, qui les adopte et en fixe le contenu politique. Par exemple tous les traités ayant trait à la paix, au commerce, à l’organisation internationale, à l’état des personnes, engageant les finances de l’État, modifiant des dispositions de nature législative, comportant cession, échange ou adjonction de territoire, doivent faire l’objet d’une validation législative relevant donc du Parlement.
Au sujet de la défense, le président de la République est chef des armées et c’est lui, seul, qui dispose du pouvoir d’actionner l’arme nucléaire notamment au titre de sa fonction de garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des traités. Néanmoins, le budget, les textes législatifs et, plus généralement, le contenu de la politique de défense relèvent du gouvernement et de sa majorité parlementaire ; donc du parlement.
Quelles que soient les considérations constitutionnelles théoriques et au-delà des affaires étrangères, la pratique de l’exercice des pouvoirs présidentiels montre que le président de la République française devient progressivement le chef de l’exécutif dès lors qu’il dispose d’une majorité parlementaire.
Or, depuis que la durée des mandats a été harmonisée à 5 ans et que l’ordre des élections est fixé (d’abord le chef de l’Etat puis l’Assemblée nationale), les résultats des élections législatives montrent que le peuple français donne une majorité au président qu’il a choisi.
Dans ce contexte de l’évolution de la pratique de l’exercice du pouvoir par le président de la République française qui devient le vrai chef de l’exécutif, il est logique de s’interroger sur la mise en place d’un contrôle démocratique qui existe dans toutes les grandes démocraties dans le monde.
De plus, l’absence de contrôle démocratique du chef de l’exécutif national qui siège au Conseil européen est une violation du droit européen.
2 – Violation du droit européen
Selon mon analyse et contrairement à la pratique actuelle, le représentant de la France au Conseil européen ne peut pas être le président de la République car il ne remplit pas la condition, prévue à l’article 10-2 du Traité sur l’Union européenne (TUE), d’être démocratiquement responsable soit devant le parlement national, soit devant les citoyens français.
En effet, l’article 10-2 du TUE prévoit, à la rubrique des principes démocratiques de l’Union, que « Les citoyens sont directement représentés, au niveau de l'Union, au Parlement européen. Les États membres sont représentés au Conseil européen par leur chef d'État ou de gouvernement et au Conseil par leurs gouvernements, eux-mêmes démocratiquement responsables, soit devant leurs parlements nationaux, soit devant leurs citoyens. »
Ainsi donc, le représentant de la France au Conseil européen est, selon mon analyse et en l’état actuel des textes, le chef du gouvernement ; c’est-à-dire le Premier ministre qui, avec son gouvernement, est démocratiquement responsable devant l’Assemblée nationale.
Cet article 10-2 du TUE, situé à la rubrique traitant des principes démocratiques de l’Union, ne fait qu’appliquer les règles qui existent dans les grandes démocraties dans le monde.
S’agissant, en particulier, du Conseil européen qui rassemble les chefs des exécutifs des Etats membres de l’Union européenne, il ne fait aucun doute que la rédaction du Traité sur l’Union européenne et son esprit conduit à conclure que la personnalité qui doit représenter un Etat au Conseil européen doit être soumise à un contrôle démocratique ; ce qui n’est pas le cas du président de la République française qui, actuellement, représente la France dans cette haute instance européenne.
Pour mieux comprendre ce qui s’est passé, revenons en arrière, dans le temps, au moment de la création du Conseil européen.
Le 10 décembre 1974, à Paris, le président de la République française, Valéry Giscard d’Estaing, annonce la mort des Sommets européens et la naissance du Conseil européen qui sonne la reprise en main de la construction européenne par les chefs de gouvernement des Etats-membres.
De ce point de vue, il se situe dans la lignée de Charles de Gaulle qui, dès les années 1959-1961, souhaite revenir sur le caractère supranational de la Communauté économique européenne (CEE), créée le 25 mars 1957 sous la IV èm République, et transformer sa structure afin qu'elle devienne davantage intergouvernementale. A ce moment-là, le général de Gaulle déclare : « se figurer qu'on peut bâtir quelque chose qui soit efficace pour l’action et qui soit approuvé par les peuples en dehors et au-dessus des États, c'est une chimère ».
Pour revenir au Sommet de Paris des 9 et 10 décembre 1974, le communiqué final ne parle que des « chefs de gouvernement » et c’est cette seule qualité qui est exigée pour être membre du tout nouveau Conseil européen ; ce qui exclut, en fait et en droit, le président de la République française car ce dernier est chef de l’Etat et non chef du gouvernement.
Il semblerait que, en privé, le président Giscard d’Estaing ait affirmé : « je suis bien le chef du gouvernement puisque je le préside ». Cette affirmation est exacte pour la présidence formelle du gouvernement car le conseil des ministres se tient à l’Elysée et est présidé par le président de la République (article 9 de la Constitution).
Mais la réalité constitutionnelle est différente car le président de la République française n’est pas le chef du gouvernement : il est le chef de l’Etat et c’est le Premier ministre qui est le chef du gouvernement.
Néanmoins, à l’époque, c’est bien le président de la République française qui va, seul, siéger au Conseil européen et, ce, sans discontinuité sauf au cours des trois périodes de cohabitation (1986-1988, 1993-1995, 1997-2002) pendant lesquelles l’on a vu cette situation singulière et, il faut le dire, un peu ridicule, où la France se présentait aux réunions du Conseil européen et aux conférences de presse qui suivaient avec deux représentants : le chef de l’Etat et le chef du gouvernement.
Initialement et avant la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989, seule la France était concernée par cette ambiguïté.
En effet, avant la vague d’adhésions post chute du mur de Berlin de 13 Etats (10 Etats en 2004, 2 Etats en 2007 et 1 Etat en 2013), la question de savoir qui, du chef de l’Etat ou du gouvernement, siège au Conseil européen au sein des 15 Etats membres ne se pose que pour les 8 républiques (Allemagne, France, Italie, Irlande, Grèce, Portugal, Autriche, Finlande) car dans les 7 monarchies (Belgique, Luxembourg, Pays-Bas, Royaume-Uni, Danemark, Espagne, Suède), le Roi (Grand-Duc pour le Luxembourg) est chef de l’Etat et il y a un chef du gouvernement démocratiquement responsable. Parmi les 8 républiques, il semble qu’il n’y ait que la France où se pose ce problème.
Depuis le 1 er mai 2004, le président de la République française n’est plus le seul chef d’Etat qui siège au Conseil européen : il y a Chypre, la Lituanie et la Roumanie pour des raisons très variées qui dépendent des systèmes institutionnels de chaque Etat et qui sont, parfois, discutées au sein même de certains Etats (Roumanie par exemple).
Le Conseil européen, composé des chefs d’Etat ou de gouvernement ainsi que de son président permanent et du président de la Commission européenne, est l’instance européenne suprême car il donne à l'Union les impulsions nécessaires à son développement et en définit les orientations et les priorités politiques générales (article 15 du TUE). La Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et de la politique de sécurité participe aux réunions.
Ces impulsions et orientations sont essentielles car elles sont prises par des personnalités qui occupent, au sein de leur Etat membre, des fonctions politiques nationales importantes : en général, elles dirigent l’exécutif, sont chefs des majorités qui gouvernent et, enfin, elles président ou sont influentes dans les partis politiques qui agissent dans les différents scrutins, par exemple, en choisissant les candidats aux élections européennes ayant vocation à être élus députés européens (exemple : Angela Merkel, chancelière d’Allemagne était présidente du principal parti politique : l’Union démocrate-chrétienne (CDU)).
En France, la réalité constitutionnelle de l’exercice du pouvoir prévoit que c’est le Premier ministre qui détermine et conduit la politique de la nation. Il exerce ces hautes responsabilités politiques avec sa majorité parlementaire dont il est le chef et c’est lui et lui seul, avec son gouvernement, qui est responsable démocratiquement devant les représentants du Peuple français siégeant à l’Assemblée nationale. C’est donc lui qui devrait représenter la France au Conseil européen.
La situation actuelle mérite d’être débattue car la France et encore moins le premier des Français, ne peuvent pas ne pas respecter les traités européens qu’ils ont signés.
Quelle crédibilité le président de la République française aurait d’exiger de ses collègues, au sein de l’Union européenne, d’abord, mais également dans le Monde, le respect d’un traité international alors que lui-même ne respecte pas un traité européen qui, par définition juridique, est un traité international dont, en application de la constitution française, il doit garantir la bonne application ?
Parmi les valeurs républicaines, il y a le droit et la démocratie ; cette dernière étant l’une des sources principales du droit. Or, lorsque la pratique du droit ne respecte plus le droit, il faut sanctionner les manquements pour qu’ils cessent ou changer la règle : sinon, c’est la crédibilité même de l’Etat de droit qui est en cause. Sauf qu’au cas particulier, il n’y a pas de sanction du non-respect du TUE : ni juridique, ni politique.
La Commission européenne, gardienne des Traités, pourrait engager une procédure d’infraction contre la France de telle sorte qu’au cours de la procédure, il soit possible d’avoir une interprétation et une analyse de cette situation par la Cour de justice de l’Union européenne. Elle ne fait rien et il ne se passe rien car personne ne dit rien.
Il y a une sorte de silence sur la situation française qui n’est pas sain et si la France veut, ce qui est souhaitable, jouer un rôle majeur au sein de l’Union européenne, elle doit en respecter les règles.
Le rapport de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique créée en juillet 2012 esquisse le sujet de la destitution en considérant (chapitre 2 – point 1) qu’il est nécessaire de lever l’ambiguïté même du texte de la constitution et d’affirmer le caractère exclusivement politique de la procédure de destitution du président de la République prévue à l’article 68 de la constitution mais, hélas, outre qu’elle ne semble pas aborder sérieusement le sujet du respect du droit européen dans son rapport final, elle ne propose qu’une simple modification de pure forme sans toucher au fond du motif de la mise en cause qui reste pour « manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec l’exercice de son mandat » : nous sommes très loin des exigences démocratiques du Traité sur l’Union européenne.
3 – Révision actuellement en cours de la constitution de la République française
Le président de la République française veut une réforme de la constitution française : c’est naturel puisqu’il souhaite, non seulement réformer, mais transformer la France.
Selon le Larousse, le verbe transformer signifie « rendre quelque chose différent, le faire changer de forme, modifier ses caractères généraux, modifier l’état physique, moral, psychologique de quelqu’un de manière spectaculaire ». Transformer est beaucoup plus fort que réformer. Réformer est lié à l’évolution ; transformer est lié à la révolution au sens de changement brusque.
Ainsi donc, et dès lors qu’il souhaite transformer la France, il paraît logique que le président de la République française entende réformer le texte fondateur de nos institutions.
Dans ce contexte, je suggère que la sphère politique et, plus généralement, l’opinion publique profite du débat sur l’actuelle révision de la constitution pour s’interroger sur le traitement de la fonction de président de la République française dans la constitution ; notamment à la veille des élections européennes prévues le 26 mai 2019.
La réforme de la constitution française peut être réalisée : soit par référendum ; soit par un vote des 3/5 du Parlement (Assemblée nationale + Sénat).
Pour atteindre une telle majorité, l’ensemble des forces politiques est concerné et il serait logique qu’un consensus le plus large possible s’instaure sur cette réforme.
Si Emmanuel Macron considère que l’intérêt de la France est que ce soit le président de la République française qui la représente au sein du Conseil européen, alors il doit accepter d’être démocratiquement responsable : c’est-à-dire qu’il puisse être destitué par le Peuple français ou ses représentants pour des motifs politiques.
Dans son discours devant le Congrès de Versailles, le lundi 9 juillet 2018, le chef de l’Etat a proposé que, dans la révision constitutionnelle actuellement en cours, soit adoptée une disposition lui permettant de débattre avec les parlementaires une fois par an. Il a ainsi rompu avec la séparation des pouvoirs qu’avait voulu le Général de Gaulle mais, également et c’est très intéressant, il a engagé un chemin visant à la clarification du régime. En effet, si le président de la République veut avoir un rôle politique, il est normal qu’il ait un lien avec la représentation nationale que sont les Parlementaires et que ce lien soit plus fort qu’un simple discours unilatéral.
Ce faisant, il s’est bien gardé, cultivant une ambiguïté curieuse et paradoxale, de remettre en cause l’irresponsabilité du président de la République française.
Est-ce volontaire ou lui-même et ses services n’y ont-ils pas pensé ?
Le fait est qu’il n’a pas été assez loin et n’a pas proposé une réforme de la Constitution pour que la France respecte les règles des grandes démocraties dans le monde : celle selon laquelle les chefs des exécutifs sont démocratiquement responsables.
Dans le prolongement de ces discours, personne ne semble s’intéresser au fait que l’irresponsabilité du chef de l’Etat ne respecte pas les règles démocratiques exigées par le Traité sur l’Union européenne pour qu’il puisse représenter la France au Conseil européen.
C’est pire que cela puisque le président de la République fait un pas de plus vers la présidentialisation du régime en proposant qu’après avoir rendu compte de son mandat devant le Congrès, il puisse débattre avec les parlementaires mais quel parlementaire aurait envie de débattre avec une personnalité politique constitutionnellement irresponsable ?
Maintenant qu’il est clair que l’actuel chef de l’Etat veut inscrire dans la Constitution de la République française un lien plus fort avec le Congrès, il faut que les parlementaires et notamment le Sénat, garant d’une sagesse et d’une vision à long terme sans oublier notre histoire, débattent du sujet de l’inclusion d’une procédure démocratique de mise en responsabilité du président de la République française.
L’autre solution est de mettre ce sujet en débat dans l’opinion publique et c’est ce que je fais en déposant ce texte avec des propositions dans le cadre du Grand débat.
Voici mes propositions.
4 – Proposition d’une procédure démocratique de mise en responsabilité du président de la République française
Sans modifier fondamentalement le juste équilibre construit par le général de Gaulle entre Parlement, président de la République et Premier ministre et dans l’unique objectif de respecter les grands principes démocratiques et le droit européen, une piste consisterait à constitutionnalise un rapport annuel du chef de l’Etat devant le Congrès réuni à Versailles qui rendrait compte de l’exercice de son mandat et exposerait ses perspectives politiques. Ce point devrait faire consensus puisque l’actuel président de la République a décidé d’en faire une pratique ; donc autant aller jusqu’au bout et constitutionnaliser cette proposition.
Puis, ainsi que le président de la République l’a proposé dans son discours devant le Congrès à Versailles le lundi 9 juin 2018, un débat aurait lieu entre lui et les membres du Congrès.
A l’issue de ce rapport et des débats qui suivraient, les membres du Congrès pourraient, en cas désaccords politiques graves, engager une procédure démocratique de mise en responsabilité du chef de l’Etat pouvant déboucher, par un vote du Congrès à une majorité qualifiée (3/5 ?), sur sa destitution immédiate et la saisine du Peuple français : il est, en effet, indispensable que seul le Peuple français reste souverain pour trancher, en définitif, un éventuel conflit politique entre le Congrès et le président de la République.
Dans cette hypothèse, je propose que les députés européens élus en France (74 actuellement et 79 dans la prochaine mandature) soient membres de droit de ce Congrès annuel.
En effet, il est logique d’associer les députés européens élus en France car, outre qu’ils seraient très utiles pendant le débat, il est normal qu’ils s’expriment car les affaires européennes pourraient être au cœur de l’intime conviction du Congrès conduisant ce dernier à engager ou pas une procédure démocratique de mise en cause de la responsabilité politique du président de la République.
De plus, il parait cohérent d’associer les deux branches de la démocratie représentative que sont les parlementaires nationaux (citoyenneté nationale) et les parlementaires européens (citoyenneté européenne) pour ce moment politique annuel important visant le président de la République pris non seulement dans sa dimension nationale mais également dans celle de représentant de la France au Conseil européen.
Ce sujet est très important et est, finalement, un débat très ancien : faut-il à la France un régime présidentiel ou parlementaire ?
Dans la constitution, le général de Gaulle, fondateur de la V è République, a donné des pouvoirs importants à la fonction de président de la République tout en maintenant son irresponsabilité pour qu’il soit la « clef de voute » des institutions. S’agissant de sa responsabilité politique, le général considérait, à titre personnel, que le président de la République devait démissionner quand il est désavoué, par exemple à l’issu d’un référendum mais, hélas, sans base juridique. Il y a longtemps que les présidents de la République ne démissionnent plus lorsqu’ils sont désavoués.
Imaginons une hypothèse, qui pourrait ne pas être si invraisemblable que cela : une personnalité d’extrême-droite ou d’extrême-gauche devient président de la République française.
Imaginons que, une fois élue et en application des pouvoirs dont elle dispose, cette personnalité prenne une ou plusieurs décisions, notamment sur le plan international, de nature politique, économique ou militaire dont les conséquences soient désastreuses pour le Peuple français de telle sorte que ce dernier aimerait s’en séparer : et bien il ne le peut pas ! et, ce, pendant toute la durée du mandat.
Naturellement dans cette situation, les parlementaires agiraient en renversant le gouvernement et en ne votant pas les textes qui ne respecteraient pas les valeurs républicaines mais il restera la position des chefs militaires et des armées : que feraient-ils ? obéiraient-ils à un chef politiquement contesté, démocratiquement irresponsable mais légitimement élu ?
La situation pourrait devenir explosive et aller à l’encontre de ce que souhaitait le général de Gaulle : la stabilité politique.
D’où l’intérêt qu’un tel sujet fasse l’objet d’un débat politique et public le plus large possible et dont la conclusion devrait être un référendum tellement le sujet est capital.
Ainsi donc, si un référendum est instauré à la suite du Grand débat, je propose qu’il soit instauré une réforme de la constitution de notre République mettant fin à l’irresponsabilité du président de la République et instaurant une procédure de mise en responsabilité démocratique de ce dernier.
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