Intégralité de la contribution intitulée "Renforcement de la représentativité"
Voici l'ensemble des réponses fournies par un contributeur du site officiel aux questions du thème Démocratie et citoyenneté le 23 janvier 2019 à Toulouse .

En qui faites-vous le plus confiance pour vous faire représenter dans la société et pourquoi ?
Idéalement, il faudrait que tous les citoyens participent au débat politique, afin d'exercer réellement leur souveraineté en tant que peuple. Dans la pratique, les citoyens n'ont pas forcément le temps, ni les connaissances ou la motivation pour participer aux décisions publiques. Cependant, je pense qu'il serait bon de confier la représentation à une assemblée de citoyens qui ne soient pas systématiquement des professionnels de la politique. Cela pourrait être simplement des citoyens tirés au sort, répondant à des critères de sélection minimum (jouissance des droits civiques, niveau d'étude minimum). Afin de ne pas exclure une part de la population, le tirage pourrait être éventuellement pondéré suivant le degré d'études, ou la catégorie socioprofessionnelle d'appartenance, afin d'assurer la meilleure représentativité possible tout en favorisant la sélection de personnes les plus aptes intellectuellement. Le cas échéant, il faudra soumettre au référendum le choix des modalités du tirage, entre: Soit une chance égale pour la seule catégorie de citoyens répondant aux critères de moralité/compétences minimums. Soit une pondération du tirage selon ces critères, mais en couvrant l'ensemble des citoyens éligibles.

En dehors des élus politiques, faut-il donner un rôle plus important aux associations et aux organisations syndicales et professionnelles ?
Non

Que faudrait-il faire pour renouer le lien entre les citoyens et les élus qui les représentent ?
L'essence de la démocratie réside dans l'exercice du pouvoir le plus directement possible par le peuple. A défaut de démocratie directe, il faut faire en sorte que la composition de l'assemblée d'élus soit la plus représentative possible du corps électoral. Chaque député devrait effectivement connaitre parfaitement la sociologie de sa circonscription, et ne pas hésiter à lancer des consultations sur un projet de loi lorsque l'enjeu lui laisse penser que cela est opportun. Une idée intéressante serait d'aligner l'indemnité parlementaire sur le salaire médian des français, voir individualiser celle de chaque élu au salaire médian de sa circonscription. Cela leur permettrait de peut-être mieux mesurer les contraintes financières d'un français moyen, et constituerait une incitation à améliorer la prospérité du pays.

Le non-cumul des mandats instauré en 2017 pour les parlementaires (députés et sénateurs) est :
Une bonne chose

Pourquoi ?
Le travail des parlementaires est de s'occuper des affaires à enjeu national. Faire des allers-retours dans une collectivité territoriale ne peut que parasiter leur travail, et représente une perte de temps et d'efficacité sur les deux tableaux.

Que faudrait-il faire pour mieux représenter les différentes sensibilités politiques ?
On parle beaucoup d'élections à la proportionnelle. Cependant, le meilleur moyen de permettre l'expression des préférences politiques est le recours au scrutin par jugement majoritaire: les citoyens sont appelés à noter et/ou classer les candidats en lice, plutôt que de choisir un seul candidat exclusivement. Sans oublier bien sûr le tirage au sort, où les sélectionnés peuvent exprimer librement leurs convictions personnelles sans devoir sa reconnaissance à des électeurs. Idéalement, il faudrait que toutes les assemblées délibérantes, locales comme nationales, soient tirées au sort sur la base de leurs corps électoraux respectifs.

Pensez-vous qu'il serait souhaitable de réduire le nombre d'élus (hors députés et sénateurs) ?
Oui

Si oui, lesquels ?
Les départements devraient être déchus de leur statut de collectivité territoriale et revenir à celui de simple circonscription administrative, car ils se trouvent à un échelon intermédiaire bancal, trop petit par rapport à la région, et trop grand par rapport à la commune. Cela reviendrait donc à dissoudre les conseils départementaux. De plus, les départements commencent à se retrouver en doublon avec les intercommunalités, qui comptent eux aussi des élus en tant que ""quatrième échelon"" de collectivité. Le cas échéant, il faudra choisir entre la dissolution de l'un ou l'autre échelon. De façon plus générale, il faut aussi réfléchir à la pertinence même d'élire des conseils ""territoriaux"", dans la mesure où la France n'est pas un Etat fédéral. Ces derniers n'ont en effet qu'une marge de manœuvre réduite dans notre Etat unitaire, venant souvent se greffer en doublon sur l'action étatique. Ils sont davantage source de dépenses que moteur de l'action publique. Sauf bien sûr à passer à une sixième République de type fédérale.

Que pensez-vous de la participation des citoyens aux élections et comment les inciter à y participer davantage ?
Il est vrai que la participation est encore trop faible de nos jours. En comptant les votes blancs et l'abstention, les présidents ne sont même pas élus à la majorité absolue du corps électoral, mais seulement à celle des bulletins exprimés. Rendre le vote obligatoire, avec sanction de l'abstention par une amende, pourrait inciter à se rendre aux urnes, mais les abstentionnistes contraints se contenteraient probablement de voter blanc, ou saboteraient leur bulletin pour qu'il soit compté nul. Il n'y a pas de secret: il faut que les représentants se montrent à la hauteur de leurs promesses de campagne durant leur mandat pour convaincre les citoyens de revenir au scrutin suivant.

Faut-il prendre en compte le vote blanc ?
Oui

Si oui, de quelle manière ?
Le vote blanc ne serait comptabilisé que dans le cadre des élections d'assemblée à scrutin plurinominal. Les sièges attribués au ""parti du vote blanc"" seraient pourvus par des citoyens tirés au sort sur la circonscription concernée, toujours suivant les éventuels critères et pondération mentionnés plus haut.

Que faudrait-il faire aujourd'hui pour mieux associer les citoyens aux grandes orientations et à la décision publique ? Comment mettre en place une démocratie plus participative ?
Utiliser le référendum, ou du moins des consultations publiques de temps en temps, pourraient encourager les citoyens à s'intéresser davantage à la politique. Mais il faut surtout que les actions entreprises pour recueillir leur avis aient des conséquences concrètes et réelles. Très honnêtement, une grande partie de la population s'est sentie désavouée par la signature du traité de Lisbonne en 2007, qui reprenait en grande partie les propositions du traité constitutionnel européen, pourtant rejeté par référendum en 2005. Plus récemment, la consultation en Loire-Atlantique sur le projet d'aéroport du Grand Ouest approuvait par une double majorité la construction (plus de la moitié des inscrits ont voté, et le Oui l'a emporté), et s'il n'était certes pas contraignant, cela n'a pas empêché l'Etat d'y renoncer finalement l'année dernière. Respecter l'avis de la majorité, quoiqu'on en pense, tant en ce qui concerne le mandat des élus que les résultats référendaires, est la condition sine qua none de la participation populaire.

Faut-il faciliter le déclenchement du référendum d'initiative partagée (le RIP est organisé à l'initiative de membres du Parlement soutenu par une partie du corps électoral) qui est applicable depuis 2015 ?
Oui

Si oui, comment ?
Tout simplement en rendant le seuil de 10% des électeurs inscrits comme suffisant et autonome pour lancer l'initiative d'un référendum, selon l'article 11. Le soutien ou non d'un cinquième des parlementaires devrait être sans conséquence. Et surtout, le projet ne devrait pas pouvoir être rejeté par la seule décision du Parlement et devrait donc se voir soumis automatiquement au référendum par le Président (ou tout au moins faudrait-il fixer un seuil supplémentaire d'approbation, au delà duquel le Parlement ne l'examine pas. Le seuil du cinquième de parlementaires pourrait y servir). Il existe déjà une plateforme pour le RIP: https://www.referendum.interieur.gouv.fr/, qui pourrait servir à recueillir les propositions citoyennes et les votes. Chaque électeur disposera d'un identifiant unique pour se connecter et contribuer. Il faudra peut-être envisager un filtrage afin d'éviter l'encombrement par toutes sortes de propositions fantaisistes, mais l'idée est de permettre à tous les citoyens de déposer. On peut supposer que le dépôt pourrait passer par l'intermédiaire de députés relayant individuellement des sollicitations récurrentes des électeurs de leurs circonscriptions, ou bien par des laboratoires d'idées accrédités (Terra Nova, Institut Montaigne, IFRAP...). Pensez aussi que cela fait bien longtemps que des pétitions circulent sur le Web. Des sites de pétitions comme Change.org ou MesOpinions.com agrègent les propositions de tout un chacun sans distinction. On pourrait imaginer que celles atteignant un certain seuil en nombre de soutiens seraient automatiquement admises sur le site officiel des initiatives référendaires. Cette réforme est la plus importante, car elle permettrait de statuer ensuite par la voie référendaire sur l'ensemble des autres sujets soulevés dans ce Grand Débat.

Que faudrait-il faire pour consulter plus directement les citoyens sur l'utilisation de l'argent public, par l'Etat et les collectivités ?
Il existe déjà les lois de règlement, les rapports de la Cour des Comptes, les synthèses d'innombrables groupes d'opinions. C'est ensuite aux citoyens de voter en fonction de ce qu'ils rapportent, pourvu qu'ils s'y intéressent un tant soit peu. Intégrer l'aspect financier dans les enquêtes publiques précédant un projet important permettrait aux citoyens de s'exprimer sur le bien-fondé de l'utilisation des deniers publics, en plus de l'aspect purement écologique.

Quel rôle nos assemblées, dont le Sénat et le Conseil économique, social et environnemental, doivent-elles jouer pour représenter nos territoires et la société civile ?
Les assemblées sont censées être un échantillon représentatif du territoire pour lequel elle prend des décisions politiques. Si l'Assemblée nationale représente l'intégralité du peuple sans distinction, le Sénat et le CESE correspondent davantage à la représentation de groupes d'intérêts particuliers, soit territoriaux (les collectivités territoriales), soit catégoriels (les organisations de nomination du CESE). Ils peuvent apporter un éclairage intéressant d'un point de vue technique sur les lois impactant leurs catégories ou territoires, mais je suis partagé sur le bien-fondé de la prise de décision en fonction d'une logique corporatiste. Dans tous les cas, il est bon que ce soit toujours l'assemblée nationale qui garde le dernier mot. Concernant les assemblées délibérantes des collectivités locales, je répète mes doutes sur leur réelle utilité dans un Etat unitaire.

Faut-il transformer [nos assemblées, dont le Sénat et le CESE] ?
Oui

Si oui, comment ?
Très clairement, je suis contre l'idée même du Sénat dans un Etat unitaire comme le nôtre, même décentralisé. J'en demande la suppression, sauf à passer à une sixième République de type fédérale. Les collectivités n'ont pas de réelle autonomie justifiant leur représentation au Parlement, et le Sénat constitue une représentation redondante des citoyens (élus locaux élisant eux-mêmes des élus nationaux). En revanche, si certains tiennent absolument au bicamérisme parlementaire, le Conseil économique, social, et environnemental (CESE) constitue une bonne solution de remplacement du Sénat. Il est constitué de représentants de la société civile, de partenaires sociaux, qui sont déjà moins partisans, et plus proches des citoyens. De plus, le CESE constituerait l'assemblée idéale pour introduire une part de tirage au sort parmi les représentants. Ces derniers ne seraient plus nommés par leurs groupes d'intérêt respectifs suivant des calculs politiciens, mais simplement tirés au sort sur l'ensemble de leurs adhérents. Il faudrait bien entendu remanier sa composition, de sorte que le gouvernement n'intervienne plus dans la nomination de certains conseillers par décret, afin de maintenir la séparation des pouvoirs. Concernant l'Assemblée nationale, il serait temps de passer à un scrutin proportionnel national, afin d'effacer le côté ""territorial"" du scrutin uninominal par circonscriptions. S'il est réellement nécessaire d'accorder un minimum de majorité à un parti, on peut tout à fait calquer le système sur les élections municipales: une prime majoritaire au parti en tête, et le reste des sièges répartis entre tous les partis en proportion de leurs voix (sans score plancher de préférence), suivant la règle de la plus forte moyenne. On peut éventuellement allouer des moindres primes aux partis dépassant le score plancher si nécessaire. Autrement, il est vrai que l'Assemblée nationale est l'assemblée qui est la plus souvent citée pour l'introduction du tirage au sort. Dans ce second scénario, la conservation des assemblées de ""spécialistes"" se justifierait en tant que rôle de conseil des citoyens inexpérimentés dans la création de lois. On peut imaginer la navette parlementaire suivante: - Examen unique du texte par chacune des deux chambres spécialistes (Sénat, CESE), qui ont le monopole de l’initiative des propositions de lois. Le texte commun est voté par l'Assemblée nationale à la majorité qualifiée (55% des députés, dont les circonscriptions représentent 65% de la population). - Lorsque les députés ne réunissent pas cette majorité, ils demandent une version amendée aux deux chambres, qui soumettent chacune séparément leur deuxième version respective du premier texte commun. L'Assemblée nationale examine ensuite les deux versions dans une seconde double lecture définitive, se terminant soit par l'approbation d'une version, soit le rejet des deux, à la majorité simple.

Que proposez-vous pour renforcer les principes de la laïcité dans le rapport entre l'Etat et les religions de notre pays ?
La seule chose que l'on demande aux croyants est de respecter les lois de la République dans leur pratique du culte. L'Etat n'a pas à se mêler des affaires de religion, et il n'est pas responsable des défaillances de celles qui ne sont pas structurées autour d'un clergé pour les organiser de manière à ce qu'elles se conforment à la loi. Les débordements éventuellement engendrés relèvent de la sécurité intérieure. Il existe par ailleurs déjà une structure chargée de la lutte contre les sectes, la MIVILUDES, qui devrait être habilitée à dénoncer les ""dérives sectaires"" de TOUTES les religions, sans distinction d'ancienneté ou de taille.

Comment garantir le respect par tous de la compréhension réciproque et des valeurs intangibles de la République ?
Il existe des cours d'éducation civique à l'école pour sensibiliser les plus jeunes. De même que les stages de citoyenneté prévus par la loi Perben 2 à l'intention des délinquants. Je ne sais pas s'il est raisonnable d'aller plus loin. Les chinois sont en train d'expérimenter un système de notation du comportement des habitants d'autant plus inquiétant qu'il s'agit d'une dictature impitoyable, dont l'évaluation pourrait dépendre moins de critères purement légalistes que des opinions politiques. Mais la France demeure une démocratie et un Etat de droit jusqu'à preuve du contraire. Serait-ce vraiment fasciste d'imaginer la création d'un profil citoyen attaché à la carte d'identité, qui réduise les prestations sociales, voire l'accès aux services publics envers les personnes régulièrement coupables d'incivilités? Cela reviendrait malheureusement à scinder le peuple en classes de citoyens différemment traitées, mais doit-on toujours exonérer les individus de toute sanction de leurs méfaits mineurs pour des raisons sociologiques? J'ai vécu en Suisse, et je sais qu'une des raisons du comportement exemplaire des citoyens helvètes est aussi la fréquence des contrôles, et l'existence de peines très lourdes (amendes de 100 CHF pour un ticket non valide) lors de la constatation d'infractions.

Que faudrait-il faire aujourd'hui pour renforcer l'engagement citoyen dans la société ?
Généraliser la participation à la vie associative est une bonne idée (peut-être qu'il serait d'ailleurs pertinent de confier une des activités périscolaires aux associations locales à objet civique, que les écoliers seraient susceptibles de poursuivre jusqu'à la vie adulte). Mais les citoyens sont libres de ne pas s'engager. Aller aux urnes est le seul minimum requis.

Quels sont les comportements civiques qu'il faut promouvoir dans notre vie quotidienne ou collective ?
On ne peut demander aux citoyens rien de plus que respecter la loi. Le reste est une question de motivation personnelle.

Que faudrait-il faire pour favoriser le développement de ces comportements civiques et par quels engagements concrets chacun peut-il y participer ?
Appliquer la loi, et sanctionner durement les infractions lorsqu'elles sont constatées.

Que faudrait-il faire pour valoriser l'engagement citoyen dans les parcours de vie, dans les relations avec l'administration et les pouvoirs publics ?
Je ne sais pas s'il est opportun de compter les activités citoyennes comme une sorte ""d'activité relevant du travail"". Les citoyens ne s'engagent que pour leur satisfaction personnelle, non dans un intérêt lucratif. Ensuite, cela peut faire partie de l'évaluation du profil citoyen cité plus haut.

Quelles sont les incivilités les plus pénibles dans la vie quotidienne et que faudrait-il faire pour lutter contre ces incivilités ?
Les déchets jetés sur la voie publique sont les plus insupportables, quelque soit leur origine (emballages, déjections canines, mégots de cigarettes). Si les autorités sont tenus de fournir les poubelles publiques pour s'en débarrasser, les citoyens ont la responsabilité absolue de ne pas les balancer derrière eux par facilité et fainéantise. Contrairement aux autres incivilités relationnelles qui ne sont au moins que temporaires, les déchets vont perdurer jusqu'à ce qu'ils soient nettoyés, ce qui peut prendre un certain temps.

Que peuvent et doivent faire les pouvoirs publics pour répondre aux incivilités ?
La solution la plus directe est de sanctionner par de lourdes amendes le contrevenant. L'extension des stages de citoyenneté aux peines contraventionnelles de récidivistes serait aussi probablement efficace (du moins comparativement à l'influence qu'ils peuvent avoir sur des délinquants endurcis).

Quel pourrait être le rôle de chacun pour faire reculer les incivilités dans la société ?
Désormais, la grande majorité des citoyens sont munis de téléphones équipés de caméras. Je ne pense pas qu'il s'agisse de délation que de demander à tout un chacun de filmer les infractions dont il est témoin et envoyer la vidéo au service de communication de la police, permettant d'identifier le contrevenant; tout en faisant office de preuve judiciaire. Concernant l'objection du risque d'agression que représente le fait de filmer une personne en infraction si jamais elle s'en prenait au cameraman, je répondrais qu'il existe désormais des applications d'enregistrement en ligne. Je pense notamment à ""Periscope"", qui permet de diffuser en direct une vidéo avec son téléphone, et conserve l'enregistrement durant les 24h suivantes. Il suffit de prévenir l'individu menaçant que les faits filmés resteront en ligne même après la destruction du téléphone, et constitueraient donc une preuve accablante en cas d'agression.

Quelles sont les discriminations les plus répandues dont vous êtes témoin ou victime ?
Pas de témoignage à relater.

Que faudrait-il faire pour lutter contre ces discriminations et construire une société plus solidaire et plus tolérante ?
C'est une question de mentalité et de modèle de société en général. Le problème est qu'il est difficile de prouver qu'une discrimination est réellement lié à un des critères définis légalement (race, sexe, religion...), car l'accusé pourra toujours arguer de critères objectifs en parallèle (sans compter le fait que les personnes discriminés souffrent effectivement d'un contexte socio-économiques dégradé qui les marginalise tout autant pour des raisons objectives que par préjugé). Il existe déjà des campagnes de sensibilisation à l'école, dans les espaces publics... On ne peut guère que sanctionner les cas flagrants, et s'efforcer d'appliquer la neutralité républicaine pour le reste.

Pensez-vous qu'il faille instaurer des contreparties aux différentes allocations de solidarité ?
Oui

Si oui, lesquelles ?
Comme mentionné plus haut, il serait opportun de conditionner l'allocation au respect de la loi et de la civilité en général. De plus, la fourniture de l'allocation ne doit pas être illimitée dans le temps et inconditionnelle: chaque année, des bilans doivent être effectués suivant des critères d'insertion définis par la loi. Une personne qui ne se plie pas aux exigences d'efforts demandés peut être radié du droit aux prestations pour un certain temps. Les personnes ne répondant plus aux conditions sociales pour bénéficier d'un droit avec le temps, par exemple l'accès à un logement en HLM, doivent aussi s'en retrouver déchu au-delà d'un certain temps de retour à la stabilité (avec une tolérance sur le dépassement du seuil d'admissibilité). Bien entendu, les pouvoirs publics apportent toute l'aide sociale et psychologique estimée nécessaire avant la privation des droits sociaux. Tout ce problème pourrait être résolu par l'instauration d'un revenu de base, par nature inconditionnel. Les aides supplémentaires, si elles perduraient, ne pourraient alors exister qu'à travers de sérieux contrats d'insertion personnalisés.

Que pensez-vous de la situation de l'immigration en France aujourd'hui et de la politique migratoire ? Quelles sont, selon vous, les critères à mettre en place pour définir la politique migratoire ?
Quand bien même il existe du chômage dans le pays, on ne peut par définition fermer la frontière tant qu'il existe un certain nombre d'emplois non pourvus en parallèle (quelques centaines de milliers). La seule condition à l'octroi du titre de séjour longue durée serait donc l'engagement du titulaire de ne chercher un travail que dans ces catégories en manque de travailleurs. Pour le reste, personne ne contestera le refus des personnes porteuses d'un casier judiciaire (selon les critères de la loi française), ni l'expulsion systématique des immigrés clandestins, dans la mesure où la France n'est voisine d'aucun pays en guerre dont la situation de détresse justifierait le franchissement de la frontière sans autorisation, et dispose d'un large réseau consulaire pour le dépôt de demandes de visas.

En matière d'immigration, une fois nos obligations d'asile remplies, souhaitez-vous que nous puissions nous fixer des objectifs annuels définis par le Parlement ?
Tant que les immigrés sont en règles individuellement avec la loi, il n'y a pas de quotas à se fixer outre mesure. La République n'accorde pas les visas sur des fondements d'homogénéité ethnique.

Que proposez-vous afin de répondre à ce défi qui va durer ?
L'immigration d'origine africaine ou arabe va bouleverser la démographie européenne, et peut potentiellement conduire à un choc ethnique, voire civilisationnel en cas de formation de communautés perpétuant des traditions de leur pays en contradiction avec la loi française (sans compter la réaction des ""autochtones""). Le défi est de réussir à intégrer sur le plan économique, mais surtout assimiler sur le plan ""civilisationnel"", de manière à aligner les comportements des nouveaux arrivés sur la loi normale républicaine.

Quelles sont, selon vous, les modalités d'intégration les plus efficaces et les plus justes à mettre en place aujourd'hui dans la société ?
C'est un travail de tous les jours. Il faut s'efforcer de traiter les résidents étrangers légaux comme n'importe quel ressortissant national, sans laxisme ni intransigeance.

Y a-t-il d'autres points sur la démocratie et la citoyenneté sur lesquels vous souhaiteriez vous exprimer ?
Il devient urgent de se poser la question du destin de la construction européenne. Dans le monde toujours plus intégré qu'est le nôtre, l'échelle nationale française n'est pas forcément la plus pertinente pour organiser des réformes avec des impacts suffisants. Le problème de l'Union Européenne est qu'elle demeure une organisation trop technocratique, trop éloignée des citoyens, avec un fonctionnement opaque. Elle a pourtant une influence cruciale sur le cadre juridique national, et personne ne nie les bienfaits du marché unique. Il faut donc absolument organiser un référendum sur la réalisation des ""Etats-Unis d'Europe"", dans lequel les Etats européens actuels deviendraient ses Etats fédérés, dont évidemment la France. Son modèle ne doit pas être forcément calqué sur celui des Etats-Unis d'Amérique. La Confédération suisse offre un exemple intéressant d'intégration respectueuse des particularismes locaux, sans compter sa notoriété en tant que démocratie semi-directe. Idéalement, le référendum sera organisé simultanément dans tous les pays membres, et rien n'empêchera les seuls pays réunissant cette majorité à constituer la Fédération (les autres demeurant dans l'Espace économique européen). Mais si les citoyens français le rejettent, il faudra quitter cette Union mi-fédérale, mi-intergouvernementale, telle qu'elle existe depuis 1992.


Lire une autre au hasard
Retour aux Thèmes